"Du joli, la passion dite amour. Si pas de jalousie, ennui. Si
jalousie, enfer bestial. Elle une esclave et lui une brute. Ignobles
romanciers, bande de menteurs qui embellissaient la passion, en
donnant l'envie aux idiotes et aux idiots." Albert Cohen n'embellit
pas la passion mais l'analyse avec une lucidité sans pareille. Des
amours entre Ariane et Solal dans la Genève du début du
siècle, il n'élude aucun aspect, ni la marche triomphale de la
passion, ni les affres de la jalousie, ni la brutalité d'une relation
plutôt sadique mais son roman demeure une des histoires
d'amour mythiques de la littérature. Brossant au passage un tableau
féroce du milieu des fonctionnaires internationaux où il a lui-même fait
toute sa carrière, mêlant un foisonnement de récits
secondaires à l'intrigue principale et passant avec une maîtrise
consommée du lyrisme le plus échevelé au constat le plus froid, Albert
Cohen donne avec Belle du Seigneur non seulement
son oeuvre maîtresse mais un des plus beaux romans du XXe siècle. --Gérard Meudal
Le début de Belle du Seigneur:
Descendu de cheval, il allait le long des noisetiers et des églantiers,
suivi des deux chevaux que le valet d'écurie tenait par les rênes,
allait dans les craquements du silence, torse nu sous le soleil de midi,
allait et souriait, étrange et princier, sûr d'une victoire. A deux
reprises, hier et avant-hier, il avait été lâche et il n'avait pas osé.
Aujourd'hui, en ce premier jour de mai, il oserait et elle l'aimerait.
une des adaptations au théâtre de certains monologues d'Ariane :
ou encore Les Soliloques de Mariette, d'après Belle du seigneur d'Albert Cohen, mise en scène Anne Quesemand, avec Anne Danais.
Mon petit mot :
Ce livre correspond à ma première participation au challenge romans cultes, cela faisait plusieurs mois qu'il était dans ma Pile A Lire et que je retardais le moment de m'y mettre. Je voulais avoir un peu de temps devant moi, et l'esprit libre pour m'y plonger totalement, il faut dire que j'en avais entendu tant de bien que l'attente était grande! Pas déçue , loin de là , j'ai surtout beaucoup aimé les deux premiers tiers environs de cette histoire. Une surprise en prime, je ne m'attendais pas à ce que le rire soit aussi présent. L'ironie,
l'humour du texte, et cette écriture si particulière au fil des pensées
des personnages plutôt caricaturaux.
C'est aussi une plongée dans une époque, dans l'histoire, la Société des Nations,, la
montée de l'antisémitisme, la bourgeoisie...
Et puis bien sûr et d'abord, les relations amoureuses, l'évolution de la passion, ...la séduction du style de l'écriture
surtout... et ces fameux textes qui ne demandent qu'à être mis en
voix.... Bref, oui, c'est bien un roman culte!